9.12.08

"Ne me secoue surtout pas car je suis plein de larmes" disait Miossec...

Il est de ces mots qui font mal. De ces mots qu’on lit par hasard et qui sans qu’on sache pourquoi nous prennent à la gorge, aux tripes. Il est de ces phrases dont on aimerait qu'elles n’aient jamais été écrites, dites. On se croirait dans une chanson de Miossec, ou de Thiéfaine. Ces chansons qui ne sont que des torrents de larmes à n’en plus finir. Et qui sont si réelles pourtant. On est là, on lit, on entend. On n’y est pour rien, c’est vrai. Mais surtout, on ne peut rien. Parce que pas à la bonne place, parce que pas capable, parce que pas mieux.

La timbre de voix haut perché d’Axl dans les oreilles, presque comme un cri, laissant mes pensées vagabonder, je savais, me doutais. Et là, j’ai vu. Coup de poignard. Est-ce la personne, est-ce le contenu, je ne sais pas. Peut-être, peut-être pas. Surement. Peu importe.

0n sait qu’on ne devrait pas, que ça ne sert à rien. Que ce n’est pas plus la première fois que la dernière. Que ça arrive à tout le monde. D’ailleurs ça a déjà fait mal avec d’autres, et ça le fera de nouveau. Qu’il faudra certainement peu de temps avant de lire une autre phrase du genre, de la même personne, ou d’une autre. Et que ce sera tout aussi douloureux. Il faudrait se blinder, oui, ça pourrait être utile. Il faudrait que cette apparence, à laquelle presque tout le monde croit, devienne réalité. Être insensible. Bonne idée. Ou pas. De toute façon, c’est pas possible. L’autre n’en saura surement rien. On le gardera pour soi. Ça vaut mieux, pas envie de s’expliquer, pas envie d’être mal compris. Pas envie que l’autre croit ce qui n’est pas. Parce qu’il n’y a rien de plus là-dedans qu’une intense douleur de voir l’autre souffrir. Et puis on ne dira de toute façon rien parce qu’on a peur que l’autre se taise. Qu’il refuse désormais de montrer sa souffrance. On la verrait quand même et ce serait pire. Oui, ça vaut mieux, on se tait.

Je monte un peu plus le volume, laissant la musique me noyer…

« Il y a une lumière spéciale qui brille toujours, même dans les nuits les plus sombres… » « Ne me secoue surtout pas, mes yeux sont pleins de larmes. »


A vous tous qui êtes passés...

Pensée d'hiver...

Paris, hiver froid, nuit sombre, tu marches dans la rue, de la musique dans les oreilles, la tête ailleurs. Tes yeux tombent sur un regard, un instant. Ce visage, tu le connais. Tu plonges dans tes souvenirs du passé pour te rappeler…

A vous, tous, qui êtes passés un jour. A vous que la vie m’a fait croiser.

Tu les as croisés, l’espace d’un instant, ou peut-être plus. C’était, avec l’un des notes jouées ensembles, avec l’autre, quelques mots échangés. C’était des yeux brillants à la fin d’un concert, brillants de larmes ou brillants de bonheur. Brillants d’émotion, ça c’est sur. C’était des silences qui en disaient bien plus que des mots. C’était un café, une bière. Un café ET une bière parfois. Parfois c’était des larmes à consoler, des mots à écouter. Parfois c’était des épaules à serrer, des mots à prononcer. C’était des personnes que tu croyais connaitre par cœur, et que tu redécouvrais encore et toujours. C’était des presqu’inconnus qui pour un moment seulement se laissaient aller tout autant que toi. C’était des regards qui parlaient sans bruit. C’était des nuits à discuter à l’autre bout du monde. C’était de ces douleurs qui s’estompaient parce qu’on se sentait moins seul. C’était de tes douleurs qui s’estompaient parce que l’autre avait moins mal. C’était le froid que tu oubliais à en tomber malade parce que ta seule attention était l’autre. C’était du temps qui passait trop vite. C’était des soleils qui se couchaient, quatre bras posés sur la rambarde d'un pont. C’était des roues au pied qui n’en finissaient plus de tourner. C’était des pâtes vaguement cuites qui servaient de prétexte à rester quelques minutes de plus. C’était des jeux de cartes qui servaient de prétexte à se retrouver. C’était d’infâmes menus best-of au McDo Rivoli, Saint-Michel, Cité de la Musique, des crêpes métro Odéon. C’était une bière au bord du Danube. C’était un vin du Chili - un bordeaux peut-être ? – dans un escalier vers Denfert. C’était des moments où seulement toi savais, où l’autre n’aurais jamais pu deviner.

C’était des moments où tu oubliais. C’était des moments où tu te disais que la vie valait d’être vécue.

Et puis voilà, le temps est passé. L’un est parti, l’autre est occupé. Ou peut-être qu’il t’a déçu. Si ce n’est pas toi. Oui, sûrement, c’est toi qui l’a déçu. On s’est dit qu’on resterait en contact. Evidemment, ça n’a jamais été le cas. Chacun s’est laissé emporter par la vie. On s’est dit qu’on s’appelait. On s’est dit qu’il faudrait qu’on fasse des trucs ensemble. Quels trucs ? Des trucs. Des fois même, on s’est pas dit. Ca s’est fait en un moment, comme ça. Sans qu’on s’en rende compte. A moins qu’on s’en soit aperçu mais on a rien dit. Si ça s’est fait après tout, il devait y avoir une raison. Pour d’autres, c’est des mots que t’as dit, des gestes que t’as fait, et que t’aurais pas du. Tu les as regrettés juste après, ou un peu plus tard. Mais à quoi bon. C’est fini de toute façon. Et puis il y a aussi ceux dont tu t’es éloigné petit à petit. Tu sais pas pourquoi, tu t’éloignes. Vous vous éloignez. Chacun s’écarte un peu plus chaque jour. Quelque chose de cassé sans doute, quelque chose qui n'est plus comme avant.

Tu aimerais les revoir. Tu vas tout faire pour, reprendre contact.

Peut-être pas.

C’est peut-être mieux comme ça, de toute façon, eux, ne se sont pas manifestés. Et puis, tu le sais, ça ne servirait à rien. C’est plus pareil maintenant.
Tes souvenirs, ils sont toujours là, plus ou moins intacts. Eux, par contre, ils sont peut-être différents.

Excuse bidon.

Bah, pas grave, cette excuse n'est destinée qu’à toi. Tu aimerais les revoir mais tu ne les reverras jamais.

Tu te dis en écrivant tout ça que c’est marrant, que peut-être ils vont lire ces mots et ne pas réaliser qu’il est question d’eux. Que peut-être ils réaliseront mais n’oseront rien dire. Que peut-être ils réaliseront mais ne voudront pas réagir.


A vous, tous, qui êtes passé un jour. A vous tous, merci. Merci de ce que vous étiez. Merci pour ces moments, merci pour ces instants. Tristes ou gais, ils étaient forts. C’est tout ce qui compte. On ne se reverra surement jamais. En tout cas, ce ne sera plus comme avant. Tant pis. J’aurais bien aimé qu’on ne se quitte jamais.
A défaut, je me souviendrais.

Paris, hiver froid, nuit sombre, tu marches dans la rue, de la musique dans les oreilles, la tête ailleurs...